Le dernier numéro de 1895 revue d'histoire du cinéma qui compte plus de 300 pages comporte un ensemble d'études et de documents d'archives relatifs à l'oeuvre théorique et méta-filmique de Marcel L'Herbier, en particulier l'édition inédite de sa conférence au Collège de France de 1923 restituée d'après le manuscrit retrouvé à la BNF. Mais on s'intéresse également à ses écrits antérieurs et postérieurs et à un film de montage sur le cinéma fantastique élaboré en 1966. Le portfolio en couleur publie le scénario peint par Autant-Lara pour son premier film, Fait Divers (1924). Le point de vue qui ouvre le numéro est consacré à la redécouverte de l'oeuvre écrite de Jean Epstein. Une étude s'attache à la figure du cinéma français des années 1920-1930, Pierre Batcheff, une autre à la stratégie commerciale de Georges Méliès et de son frère Paul aux États-Unis. Dans la partie Archives, un entretien avec Eveline Cauhépé poursuit la série consacrée au label « art et d'essai ». L' abondante rubrique des Chroniques propose enfin des comptes rendus détaillés d'expositions et d'ouvrages touchant à l'histoire du cinéma.
En 1961, la Cinémathèque française acquérait 380 lettres d'Etienne-Jules Marey adressées - entre 1881 et 1894 - à son préparateur, Georges Demenÿ.
C'est cette précieuse correspondance, actuellement conservée à la Bibliothèque du Film, qui est éditée ici, avec un certain nombre de lettres trouvées dans d'autres archives. En outre, une soixantaine de lettres inédites de la période 1877-1904, dont la plupart sont adressées à Marey, figurent en annexe. Pleines de vie et très largement inédites, les 502 lettres ainsi rassemblées permettent de suivre avec précision le programme scientifique développé par Marey et Demenÿ à la Station physiologique du Parc des Princes ; elles nous éclairent sur la genèse des différents appareils chronophotographiques mis au point par les deux chercheurs ; elles nous renseignent sur la science de l'époque, sur la vie de Marey, sur ses voyages et son travail à Naples.
Une source inestimable pour comprendre l'immense apport de Marey à l'analyse et à la synthèse du mouvement.
Le dernier numéro de 1895 revue d'histoire du cinéma (n°95, hiver 2020) célèbre le centenaire de la naissance de Pier Paolo Pasolini en s'attachant aux rapports de filiation et de rejet que le poète et cinéaste entretint avec le dirigeant révolutionnaire et théoricien marxiste Antonio Gramsci (Point de vue d'Anthony Crézégut), ainsi qu'avec un hommage inédit en français de Bernardo Bertolucci à celui qui fut son maître, et d'autres documents relatifs au cinéaste. Federico Lancialonga et Chloé Folens décrivent les archives du mouvement militant italiennes. Parmi les études et un des documents d'Archives, c'est la question du film sur l'art sur laquelle revient Joséphine Haillot à partir de l'entreprise de Lauro Venturi dans le domaine de l'édition comme du cinéma, en l'occurrence son travail sur le peintre Pierre Bonnard. Stanislas de Courville étudie les relations entre le poète russe Alexandre Blok et l'écrivain Andréi Biély autour de la notion de « baraque de foire » avec laquelle ils appréhendent le cinéma naissant. Maria Ida Bernabei de son côté étudie la place des animaux dans les films documentaires que les salles d'avant-garde des années 1920 chérissaient. La partie Chroniques propose des comptes rendus détaillés de festivals patrimoniaux, livres, revues et DVD concernant l'histoire du cinéma.
Le numéro 96 de 1895 revue d'histoire du cinéma (printemps 2022) est largement consacré au cinéma des premiers temps et à la culture spectaculaire au tournant des XIXe et XXe siècles. Le cinéma héritera des spectacles scéniques à l'extraordinaire inventivité comme des attractions des foires telle celle de Gand. On examine en outre les lieux où se voient les bandes du premier cinéma (cafés, magasins Dufayel) étudiés à partir d'archives inédites. Ainsi le cabaret du Néant et ses attractions macabres, les programmes du Cinématographe-Lumière (puis le Select) qui introduisent un montage de vues ouvrant à la narration. En dehors de cet ensemble, un entretien avec une exploitante de cinémas d'art et d'essai mais aussi de salles X, Simone Lancelot, et la correspondance de François Truffaut et de ses lecteurs ordinaires ou célèbres qui le lisaient dans Arts-spectacles et lui écrivaient soit pour le soutenir, soit pour l'apostropher. Dans la rubrique des Chroniques nombreux comptes rendus d'expositions, de livres et de DVD.
L'oeuvre de Marcel L'Herbier est à bien des égards assez mal connue. Le plus souvent, on le présente uniquement comme un des pionniers de l'avant-garde française des années 1920, aux côtés de Gance, Delluc, Dulac et Epstein, en ignorant ou négligeant ce qu'il fit ensuite. Or, si la place que L'Herbier occupe dans la « Première Vague » du cinéma français (1918-1929) est en effet considérable, aussi bien aux plans de la théorie esthétique, des réalisations expérimentales, que des innovations dans les collaborations avec les autres arts (littérature, peinture, musique, architecture.), son abondante production ultérieure est également intéressante. Elle témoigne à divers titres des courants dominants en matière de genres, de thèmes et de partis pris esthétiques dans les années 1930-1940. De plus, le rôle de Marcel L'Herbier comme producteur, défenseur de la profession cinématographique, son action au sein de la Société des auteurs de films, de la Cinémathèque française, de l'Idhec qu'il fonda, ainsi que son engagement dans l'émergence de la télévision après la Deuxième Guerre mondiale, en font incontestablement un personnage central de la cinématographie en France.
Il était donc nécessaire de revenir aujourd'hui sur la longue et exceptionnelle carrière de Marcel L'Herbier. D'autant plus que la plupart de ses films sont désormais restaurés et visibles, et que subsiste une quantité très importante d'archives publiques et privées le concernant. Un tel réexamen suppose bien entendu d'éviter les défauts d'une étude purement biographique au profit d'analyses problématisées des différents aspects de son oeuvre. C'est ce à quoi se sont attachés les contributeurs de ce livre. Dans la plupart des textes ici rassemblés, une perspective historique a été privilégiée, mais d'autres approches ont été également retenues pour permettre d'aborder une réflexion plus large.
Dans sa politique éditoriale, l'Association française de recherche sur l'histoire du cinéma a accordé une grande place aux études monographiques en publiant dans sa revue 1895 des numéros consacrés à André Antoine, Jean Grémillon, Jacques Feyder, René Clair, Christian-Jaque, en attendant des ensembles en préparation sur Abel Gance, Louis Feuillade, Albert Capellani.
En éditant aujourd'hui dans sa collection de livres les Actes du colloque René Clair ou le Cinéma à la lettre qui s'est tenu à la Bibliothèque nationale de France les 6 et 7 novembre 1998, l'AFRHC participe à un travail permanent de réévaluation des metteurs en scène et des films. Grâce à une vingtaine de communications de chercheurs français et étrangers réunies par Noël Herpe et Emmanuelle Toulet, l'oeuvre de René Clair est remise en perspective dans son temps et dans le contexte qui en a vu l'épanouissement.
Sans vouloir les soumettre à un jugement définitif, les films du cinéaste, par la multiplicité et la diversité des approches, sont éclairés dans l'optique de leur classicisme trompeur ; ils sont analysés aussi dans les fluctuations des approches critiques qui leur ont été consacrées. Avec le recul, René Clair y apparaît comme un étonnant inventeur de formes plastiques et sonores. Dans une oeuvre où l'intelligence le dispute à la sensibilité - à rebrousse poil de la figure un peu distante d'un homme qui cachait ses élans intimes derrière la fausse intransigeance du moraliste obsédé par la fuite du temps - se construit un des maillons essentiels de l'histoire du cinéma français, à la confluence contradictoire entre l'écrit et l'image.
Au sommaire : F. Albera, «Le détour par Caravage» ; L. Le Forestier, «Comment peut-on encore être "cinémato-barthésien" ? Quelques réflexions sur Barthes, l'Histoire, le cinéma» ; M. Aubert, «Les nouvelles perspectives d'accès aux collections des Archives françaises du film du Centre national de la cinématographie». Suivent les rubriques comptes rendus de livres, notes de lecture et nouvelles sur l'actualité.
Découvrez 1895 N° 65, Hiver 2011. Histoire des métiers du cinéma en France avant 1945 avec 1 DVD, le livre de Laurent Le Forestier