Entre la Nouvelle Vague et aujourd'hui, le cinéma français fut d'une richesse et d'une invention incomparables, nourri de références et cherchant des perspectives nouvelles pour parler du monde. Maurice Pialat, Agnès Varda, mais aussi Claire Denis, Jean-François Stévenin, Arnaud Desplechin ou Rabah Ameur-Zaïmeche inventent des formes qui composent discrètement un rapport singulier entre le cinéma et le réel où l'intensité des corps filmés voisine avec l'ironie des images. Derrière les personnalités, se dessine ainsi un mouvement cohérent qu'il faut analyser en remontant aux inspirateurs initiaux, Renoir ou Cocteau, et en dressant un tableau d'oeuvres contemporaines marquantes. Ni encyclopédie, ni tableau d'honneur, ce livre est un exercice d'admiration pour les éclats créatifs d'un cinéma aussi vivant que cohérent sur lequel manquait un regard synthétique.
On le sait bien, le véritable scénariste de Matrix est René Descartes. On le sait peut-être un peu moins, mais Descartes avait également beaucoup de points communs avec Tom Cruise. Que ce soit Kant ou Nietzsche qui jouent des rôles de premier plan dans Star Trek ou encore John Locke qui inspire les créateurs d'Avatar, les films de cinéma et les séries télévisées débordent de philosophie.
Un grand corbeau, un chat noir, un masque rouge sinistre, l'éclat d'une blancheur sublime, un battement cardiaque assourdissant, une dulcinée tirée d'outre-tombe déambulant sous une lune blafarde, ... L'univers littéraire d'Edgar Allan Poe est constitué d'images chocs, efficaces et concises, douées d'un fort pouvoir entêtant. L'écrivain se plaisait à structurer son écriture autour de ces refrains visuels et sonores, qu'il pouvait faire transiter au sein d'un même texte mais aussi d'une nouvelle ou d'un poème à l'autre. Cet ouvrage examine les résonnances formelles de l'imaginaire poesque à partir de la circulation de ces motifs au cinéma et à la télévision. Conçu comme un élément narratif et plastique, visuel et sonore, le motif permet de tisser des structures en arabesques telles que les affectionnait Poe via sa recherche de « l'effet » esthétique. Phénomènes éminemment intertextuels, les motifs poesques permettent de repenser l'histoire et l'auctorialité de ces formes fantastiques et gothiques comme autant de relations productives entre circulation et transformation, références et interprétations, dissémination et unité. Pour cela, les neuf chapitres proposent des études d'adaptations écrites et filmées par Jean Epstein, Roger Corman, Alexandre Astruc et Éric Rohmer, mais aussi de films et de séries secrètement hantés par la présence de Poe comme The Thing, Twixt, Antichrist, Following ou encore Altered Carbon.
Comment considérer la présence de quelques formes géométriques dans le cinéma de fiction, non pas tant pour leur fonction narrative ou ornementale, qu'à proportion des connexions qu'elles engagent avec l'histoire et la théorie de l'art ? On sait ce que la perspective linéaire doit aux grilles, damiers et autres cubes - tous éléments princeps de l'élaboration de son illusion de profondeur. Mais on ne s'est pas suffisamment étonné du fait que ces outils au service de l'illusion apparaissent aussi bien en tant que motifs, logés au coeur des tableaux comme autant de figures rappelant la fabrique de l'image.
Si le cinéma n'a guère besoin du treillis de Dürer ou du damier de Filippo Lippi pour élaborer son espace avec (ou sans) son illusion de profondeur, il offre cependant au regard quantité de damiers (ainsi, dans La Notte, 1961), de grilles (depuis The Incredible Shrinking Man, 1957, jusqu'à Tron, 1982), de cubes (Cube, 1997). Nous gageons que ces modules géométriques sont les indices de problèmes de représentation peu ou prou anciens dont les films se ressaisissent trouvant, dans la fiction, le moyen de remettre en jeu ou en scène leur histoire.
Super 8, IMAX, scope, widescreen... Ces noms liés à des formats cinématographiques sont souvent assez évocateurs pour les spectateurs mais rares sont ceux qui savent réellement ce qu'ils désignent. Pourtant, chacun fait régulièrement l'expérience des formats, que les films soient vus à la télévision, au cinéma ou sur une tablette.
Cet ouvrage réunit dix-sept contributions qui traitent du format dans toutes ses acceptions (format de pellicule, de projection, d'appareil) et selon des aspects multiples (technique, économique, esthétique ou encore sociologique). S'intéressant à des objets de recherche très variés (CinemaScope, Cinerama, VistaVision, Pathé-Baby, Pathé KOK, Super 16, 70 mm, open matte, ratio 4/3, etc.), les auteurs ici réunis, ainsi que les professionnels convoqués à l'occasion d'entretiens inédits, montrent comment l'étude du format peut renouveler la compréhension des systèmes de production et de diffusion, alimenter le travail analytique mené sur les ½uvres audiovisuelles, mais aussi documenter les logiques d'appropriation des techniques, dans les sphères domestiques ou pédagogiques par exemple.
Patrice Chéreau se passionne pour le théâtre depuis ses plus jeunes années. Au lycée Louis-le-Grand, il en découvre tous les aspects, jusqu'à la signature de sa première mise en scène en 1964, à l'âge de vingt ans.
Ce livre retrace et éclaire le parcours de cet artiste majeur du second xxe et de la première dé-cennie du XXIe dont l'une des grandes originalités consiste à établir continuellement des corres-pondances entre peinture, cinéma, musique et spectacle vivant. De Peer Gynt à Hamlet, du Ring de Wagner sifflé puis encensé à Bayreuth jusqu'à Elektra qui triomphe et bouleverse au Festival d'Aix-en-Provence en 2013, de son premier téléfilm méconnu, Le Compagnon, jusqu'à La Reine Margot, ce créateur d'exception construit sans relâche sa vie de metteur en scène de théâtre et d'opéra, de réalisateur et scénariste, mais également d'acteur.
Cet ouvrage croise les regards, fait dialoguer artistes, chercheurs et responsables culturels pour approcher au plus près du travail de création. Il met aussi l'accent sur la réception des oeuvres et leur postérité, montre leur rayonnement et leur portée, nationale et internationale.
Cette publication, qui se fonde sur une très riche documentation écrite et visuelle, présente de nombreuses photographies, pour la plupart inédites, de l'artiste au travail et de ses créations. Il invite les publics les plus larges à découvrir ou redécouvrir une oeuvre unique, puissante et foisonnante.
Ont collaboré à cet ouvrage :
Antoine de Baecque, Michel Bataillon, Anne-Françoise Benhamou. Alain Berland, Yves Bernard. Roland Bertin. Christian Bief, Dominique Blanc, Jacques-Olivier Boudon, Laurence Bourdil, Dominique Bruguière, Éric Caravaca, Philippe Calvario, Julien Centrés, Bertrand Couderc, Philippe Coutant, Gérard Desarthe, André Diot, François Dunoyer, Anaïs Fléchet, Gabriel Garran. Pascale Goetschel, André Helbo, Clément Hervieu-Léger, Béatrice Houplain, Vincent Huguet, Flermine Karagheuz, Jean- Marie Le Gall, Serge Linarès, Mathieu Lericq, Marie-Françoise Lévy, Alain Libolt. Antoine Marès, Valérie Nègre. Éric Neveux, Jean-Sébastien Noël, Serge Pauthe, Richard Peduzzi, Aurore Renaut, Guillaume Scaillet, André Serré, Marie-Noële Sicard, Marielle Silhouette, Valérie Six, Bernard Sobel, Carlotta Sorba, Bernard Steffenino, Catherine Tasca, Thierry Thieû Niang, Bertrand Tillier, Anne-Louise Trividic, Pierre Trividic, Myriam Tsikounas, Marguerite Vappereau, Hélène Vincent, Jean-Pierre Vincent, Ana Vinuela, Jean-Claude Yon.
Hollywood, fin des années 1960. Une nouvelle génération de cinéastes, majoritairement venus de la télévision ou des écoles de cinéma, prend le pouvoir. Parmi eux, Martin Scorsese, Brian De Palma, Francis Ford Coppola, Arthur Penn, Sam Peckinpah, Robert Altman, William Friedkin, Dennis Hopper, Mike Nichols, Alan J. Pakula, Sidney Lumet, et bien d'autres encore.
Du fait de leurs formations et de leurs influences, ces réalisateurs transforment en profondeur le style cinématographique. Ils recourent à des techniques, des formes et des figures jusque-là peu ou pas employées par le cinéma américain : le zoom, le split screen, la caméra portée, les dialogues qui se chevauchent, le ralenti, les montages ultrarapides... Tous ces procédés contribuent à renouveler le « point de vue », c'est-à-dire les positions successivement assignées au spectateur par la composition des plans, mais aussi par les mouvements de caméra et le montage. Il en résulte, entre autres, un important changement de régime spectatoriel.
Ce sont ces évolutions que notre étude se propose d'examiner, pour en mettre au jour, dans une perspective de stylistique historique, la logique sous-jacente.
Connu comme l'un des cinéastes majeurs de la dissidence pendant la dictature franquiste, Carlos Saura l'est également pour ses nombreux films musicaux (Carmen, Tango) où la danse occupe une place centrale. Elle est aussi présente, sous une forme ou une autre, dans la plupart de ses films, et sert ici de fil d'Ariane pour s'orienter dans une oeuvre protéiforme et souvent hétérogène.
Du bal populaire aux enlacements intimes, du ballet professionnel à la danse de combat ou de possession, le corps dansant traverse quasiment toute la filmographie où il dessine à la fois l'évolution d'une société, la libération des corps et des esprits, et la trajectoire esthétique d'un cinéaste également peintre et photographe. Recourant d'abord à la métaphore comme stratégie de contournement de la censure, il prolonge sa recherche formelle en élaborant des mises en abyme complexes, puis la réflexivité du processus de création devient une structure de prédilection qui aboutit, dès les années 1980, à un dialogue entre les arts se poursuivant jusqu'au dernier opus en date (Beyond flamenco, 2016). Dans la dernière partie de la filmographie, la danse et la musique partagent l'image filmique avec la peinture, la photographie, la projection cinématographique, la scénographie théâtrale, dans un vaste mouvement d'hybridation des formes et des langages.
Ce livre propose ainsi de revisiter la majeure partie des films de Carlos Saura au prisme de la danse, et ouvre à une réflexion plus large sur l'ensemble de l'oeuvre, le rapport au corps, à l'art et à la représentation.
"L'Antiquité n'a peut-être jamais existé, mais il ne fait aucun doute que nous en avons rêvé." C'est avec ces mots que Federico Fellini commente son Satyricon, film halluciné où le passé, en cette année 1969, prend une allure psychédélique. La même année, pendant le tournage de Médée, Pier Paolo Pasolini a une vision, celle d'une Figure antique qui s'aperçoit qu'elle n'est plus aimée et décide de se suicider.
Cet ouvrage étudie comment ces deux cinéastes, nés sous un régime qui a manipulé l'antiquité à des fins idéologiques, se confrontent à leur tour à l'antique et l'"inventent" pour penser leur temps - le fascisme puis le "Nouveau fascisme", la société de consommation contemporaine - et pour réinventer leur médium, le cinéma. Il articule donc une réflexion esthétique sur ce que l'on a pu appeler la modernité cinématographique et une réflexion politique sur les temps modernes au sens économico-socio-politique.
L'antique, ici, n'est pas limité aux bornes chronologiques traditionnelles de l'Antiquité ni aux figures monumentales que le cinéma de genre a mises en scène : il ne se trouve qu'au présent et se décline dans l'humble, le marginal, le ruiné, le fragmentaire. Fellini plonge dans l'univers chaotique et placentaire de la création en studio. Pasolini, à l'inverse, se déplace toujours plus loin du centre, à la rencontre de nouveaux corps, et de nouvelles terres à arpenter. Pourtant, tous deux passent par la psychanalyse et l'ethno-anthropologie pour trouver des survivances, porter à la lumière ce que la modernité refoule, et fabuler à partir de là. Pour tous deux, l'invention est donc autant une démarche archéologique de mise au jour qu'un geste frontalement poétique. Le prisme antique met ainsi en évidence comment une modernité esthétique a pu prendre forme contre, ou tout contre, une autre modernité, sociale, économique, et politique.
À l'heure où émergent plusieurs cinématographies issues de studios régionaux de Sibérie, cet ouvrage examine la représentation et la participation des peuples autochtones du Nord dans les films de cinéma et de télévision soviétiques. En effet, des années 1920 aux années 1980, les figures filmiques des peuples du Nord ont été tiraillées entre visions du « progrès » et de l'« authenticité », produisant autant d'images qui permettaient à l'URSS d'évaluer sa propre perception de la modernité. Au-delà de la stricte analyse des représentations, ce livre déplace le point de vue vers l'expérience des autochtones, acteurs ou assistants, ayant participé à la production de ces images des deux côtés de la caméra.
Ce livre étudie les interactions entre le cinéma et l'opéra, interactions qui se répètent et se réinventent constamment à travers des relations institutionnelles, techniques, esthétiques, génériques, formelles et humaines. Les contributions sont complétées d'entretiens avec la compositrice Michèle Reverdy et les réalisateurs Philippe Béziat, Benoît Jacquot, Jacques Martineau et Olivier Simonnet.
Avec le soutien du CELLAM (EA 3206) de l'université de Rennes 2 , du Centre de littérature et de poétique comparée (EA 3931) de l'université Paris Nanterre , du Centre de recherche en littérature comparée (EA 4510) de l'université de Paris-Sorbonne et de l'ELLIADD (EA 4661) de l'université de Franche-Comté.
En s'associant à un film, toute musique préexistante apporte non seulement son atmosphère sonore particulière mais également un réseau de significations liées à son histoire. En se concentrant sur la "musique classique" - expression désignant ici une certaine manière "savante" d'élaborer une oeuvre -, cet ouvrage s'empare de morceaux riches d'une tradition interprétative et d'une réception qui ont parfois plusieurs siècles. Outre une charge sémantique nouvelle, le passage d'un média à un autre induit une perte d'autonomie, de profonds changements dans les contextes d'exécution et les conditions d'écoute, le passage d'une temporalité de la moyenne ou de la longue durée - permettant le développement de la forme musicale - à des formats souvent très réduits qui trahissent d'inévitables coupures. Les cinq thématiques de ce livre - "Topoï de la musique classique au cinéma", "Musique et vérité historique", "Musique et narration", "Musique et identité" et "Musique et structure" - croisent d'autres questionnements concernant les choix d'extraits opérés, les interprétations retenues, la manière dont la musique classique dialogue avec d'autres musiques préexistantes et la musique originale, les arrangements et les réécritures pour s'adapter au propos filmique.
Pourquoi établir des liens entre des images de films radicalement différents, au-delà des auteurs, des pays et des époques ? Parce que ces images convoquent des motifs visuels qui hantent le cinéma depuis ses origines : la fenêtre, la nuque, l'escalier, le miroir, le labyrinthe, le téléphone, le chat, le cri, et tant d'autres... Ces motifs ont des affinités profondes avec le langage et le récit cinématographiques.
Ils sont de ce fait universels, pluriels, ambigus, et chaque cinéaste est incité à les adopter, les transformer et les réinterpréter. Les motifs de cinéma ont une grande agilité à se mouvoir : migrer d'un film à l'autre, d'un cinéaste à l'autre, d'une époque à une autre. Par le jeu des reprises et des différences, ils imprègnent la mémoire émotionnelle du spectateur et ouvrent une nouvelle perspective à l'histoire du cinéma.
Les soixante motifs analysés et le millier de films cités donnent la mesure de l'impact visuel et narratif de ces images séminales, souvent reliées à la tradition picturale. Ce livre établit des liens comparatifs entre des créateurs qui ont confronté leur art à un même motif, permettant ainsi d'identifier leur singularité, leur rapport intime et personnel à ce motif, et leur rapport à l'histoire commune des images cinématographiques.
Une des ambitions principales de cette riche collection de textes, adossés à des photogrammes choisis par les auteurs eux-mêmes, est de susciter l'émergence d'une possible théorie du motif en cinéma.
Le studio de la Tôei Dôga, fondé en 1956, est dans le Japon d'après-guerre tout à la fois le creuset d'une certaine conception de l'animation, le lieu de la formation d'une grande partie des animateurs, mais aussi le lieu d'émergence et de (ré)invention de l'animation japonaise. Le directeur du studio Hiroshi Okawa cherche à le définir comme le "Disney de l'Orient" et l'oriente vers la production de longs métrages d'animation pour le cinéma.
Par le biais de deux groupes de production issus de la même base, Slon (1968-1973) et Iskra qui lui succède, l'auteure de cet ouvrage interroge les modalités d'intervention politique d'une partie des acteurs du champ cinématographique français, de la fin des années 1960 à la fin des années 1980. Ce travail interroge l'élaboration de modèles de productions spécifiques s'opposant au fonctionnement de l'industrie cinématographique, la diversité des voies d'engagement en cinéma ainsi que l'émergence de nouvelles pratiques de diffusion à l'aide d'archives jusqu'alors inexploitées et du recueil de nombreux témoignages.
Le concept d'un Nouveau Cinéma latino-américain apparaît à la fin des années 1960 pour décrire les liens entre les expériences de rénovation cinématographique menées par divers cinéastes de gauche. Loué par certains réalisateurs et critiques, fortement contesté par d'autres, que sait-on aujourd'hui de ce Nouveau Cinéma latino-américain? Ce livre retrace les origines et les développements de ce projet cinématographique à l'échelle de l'Amérique latine. Les connexions établies entre les réalisateurs et les institutions cinématographiques, les dialogues esthétiques, les circulations d'objets culturels et leurs appropriations sont au coeur de la réflexion. À partir de l'Institut cubain de l'art et de l'industrie cinématographiques, l'école documentaire de Santa Fe, Chile Films, de Glauber Rocha et du groupe Cine Liberación, l'auteur analyse les conceptions, les médiations et les échanges portés par le Nouveau Cinéma latino-américain.
Du cinéma qui naît à la fin du XIXe siècle à celui qui s'expose aujourd'hui au musée, s'est jouée une histoire en trois temps, dont chacun est venu décrire un usage théorique et social du signifiant « cinéma ». Le premier est le moment Lumière. Le second, le moment Canudo et le troisième, le moment Youngblood. Cet essai se propose de reprendre l'histoire de ces moments cinématographiques et fait l'hypothèse que le cinéma ne s'est maintenu septième dans la suite des arts qu'au prix d'un conflit de définitions qui ne s'est pas achevé avec la généralisation de son modèle économique.
Avec le soutien du laboratoire PASSAGES XX-XXI et de l'université Lumière Lyon 2.
L'attention portée aux gestes confirme le tournant anthropologique que connaissent depuis quelques années les études cinématographiques. Le geste filmé, le geste de filmer, le geste de recevoir un film et de lui répondre sont les vecteurs d'une expérience partagée : repris, détaillé, le geste filmé s'offre comme réalité sensible et adresse à l'autre. Loin de toute assignation de sens comme de toute obligation de résultat, le geste s'impose ainsi, selon Agamben qui est le fil rouge de ce volume, comme l'une des dernières formes d'expression du politique. L'expérience du film rendrait ainsi possible une nouvelle définition de l'être-ensemble qui constitue le politique : un passage de relais où personne filmée, cinéaste, spectateur, tour à tour s'exposent et (se) regardent.
Les textes de ce volume cernent les points de tension où s'impose, dans l'éclat et l'éclair d'un geste, cette dimension politique, entre emprise et émancipation, action militante et mise en scène de soi. C'est surtout dans les formes libres du film-essai ou du documentaire de création, de Pasolini à Godard, de Kiarostami à Kawase, de Farocki à Wang Bing et de Zilnik à Klotz et Perceval que s'illustrent ces oscillations. Les contributions de trois cinéastes passeurs, Xavier Christiaens, Sylvain George et Sothean Nhieim, perpétuent le geste politique dont est ici proposée l'analyse.
Comment parle-t-on du grand écran sur le petit écran ? Comment filmer l'oeuvre d'un architecte ? Comment évoquer les nuances d'un tableau impressionniste dans une émission en noir et blanc? La télévision française a-t-elle créé son propre "musée imaginaire", et quel rôle a-t-elle joué dans la diffusion d'oeuvres expérimentales et méconnues ? Dans quelle mesure l'a-t-on pensée comme un lieu de création artistique à part entière, et pas seulement comme un média de transmission et de valorisation des arts plus anciens ou plus légitimes ? Autant de sujets de réflexion qui fondent le projet de cet ouvrage. Mêlant des approches esthétiques, historiques et techniques, ce recueil apporte des éclairages variés sur la manière dont la télévision française a contribué à écrire et diffuser une certaine histoire - voire une certaine idée - de l'art, et dont elle a pu elle-même se penser, simultanément, comme un lieu de création autonome, proche en cela de l'art vidéo qui s'est développé à partir des années 1960. On y trouvera, entre autres, des études sur le service de la recherche de l'ORTF, sur l'empreinte de grandes personnalités télévisuelles telles que Magdeleine Hours, Jean-Christophe Averty ou Jean-Marie Drot,ou encore sur la politique culturelle d'Arte, grande pourvoyeuse de programmes sur l'art depuis sa création en 1992.
Issu d'une collaboration avec l'institut national de l'audiovisuel (Ina), cet ouvrage prolonge et complète le recueil d'entretiens avec des personnalités ayant marqué l'histoire de la télévision française La Télévision et les Arts: soixante années de production, publié sous la direction de Roxane Hamery en 2014 (PUR, coll. "Le Spectaculaire - Cinéma").
Avec des contributions de Lucie Alexis, Jérôme Allain, Vincent Amiel, Anouk Bellanger, Emilie Blanc, Roland Carrée, Marie-France Chambat-Houillon, Simon Daniellou, Arnaud Duprat, Bruno Élisabeth, Antony Fiant, Catherine Gonnard, Roxane Hamery, Damien Keller, Antje Kramer- Mallordy, Élisabeth Lebovici, Thibault Le Hégarat, Jessie Martin, Jean-Baptiste Massuet, Clémence de Montgolfier, Priska Morrissey, Éric Thouvenel, Dick Tomasovic et Guillaume Vernet.
Malgré sa présence avérée au cinéma et en photographie, le nocturne n'a pas été systématiquement pensé comme tel au sein de ces deux médiums. Est-ce plutôt un genre artistique, ou bien une catégorie esthétique rassemblant différentes formes artistiques ? Est-ce plutôt une atmosphère (Stimmung) apte à conférer aux différentes images une tonalité émotionnelle singulière, ou bien, de façon plus aisément repérable, un dispositif ou un ensemble de dispositifs destinés à favoriser son surgissement ? Et, si le nocturne rencontre d'impressionnants succès dans « le noir et blanc », en quoi son plein développement est-il lié à l'émergence de la couleur non seulement au cinéma, mais, avec un léger retard, en photographie ? Pour répondre à ces questions, Judith Langendorff étudie au plus près les techniques et les processus de création de réalisateurs et de photographes de la fin des années 1970 et des décennies suivantes, chez lesquels l'emploi de la couleur s'est généralisé et est devenu de plus en plus intense et raffiné. Son fil conducteur est une typologie des métamorphoses liées au nocturne. Elle part d'un inventaire des distorsions de la vision nocturne pour aboutir à la mise en évidence du processus de sublimation qui fonde leur emploi, en rendant accessible un discours interne et en laissant apparaître les motivations des auteurs ou du récit. Ainsi aboutit-elle, dans un troisième temps, au repérage de véritables transfigurations qui semblent attester le rayonnement de l'invisible et le passage d'un univers dans un autre.
Surface sensible aux émois intérieurs comme aux épreuves extérieures, surface intime exposée au regard et fantasmatiquement au toucher, surface graphique et picturale aux mille colorations et textures, la peau joue un rôle fondamental dans l'économie du désir que le cinéma tisse depuis ses origines. Cet ouvrage constitue la première étude universitaire qui accorde de l'importance à un élément du corps humain étonnamment absents des études cinématographiques.
Avec le soutien de l'équipe d'accueil Arts : pratiques et poétiques de l'université Rennes 2.
Ce livre propose une étude des relations entre l'art magique et le cinématographe. Aux débuts du cinéma, les prestidigitateurs, illusionnistes ou manipulateurs ont projeté et parfois produit des films étonnants ; chaque genre se retrouve dans leur manière de penser cette nouvelle machine, qui s'amalgame à leur spectacle. Partant des origines des escamoteurs, l'évolution de la prestidigitation à la fin du XIXe mène à l'illusionnisme.
Les créations de Buatier de Kolta implantent ce paradigme scientifique qui régénère la magie optique, tel son brevet du théâtre noir qui propose en 1888, une écriture lumineuse de l'espace. A partir de 1900, les représentations françaises de Leopoldo Fregoli empruntent une autre voie et repoussent les limites des pièces magiques. Son spectacle ne repose plus sur l'altération des identités précédemment mises en oeuvre, mais sur le choc des attractions propre aux music-halls.
Finalement, la figure du manipulateur, qui s'insinue entre autres lors des tournées de Gaston Velle, interroge les magiciens sur la place que doit tenir l'habileté manuelle. Paradoxalement, ces numéros divisent autant qu'ils structurent les premiers groupements corporatifs. L'ensemble de ces évolutions techniques et esthétiques peut s'appréhender en cycle, dont on retrouve les fondements dans la filmographie de Georges Méliès et plus généralement dans la pensée et l'écriture magique du cinéma.
L'étude de cinématographies nationales (Hongkong, Corée du Sud, Japon et Taiwan) est l'occasion de mettre en correspondance les spécificités géopolitiques de chacun de ces « pays » et certains éléments constitutifs de leurs cinémas respectifs. L'approche géopolitique se présente comme une contre-proposition à l'uniformité culturelle proposée par la notion de « cinéma asiatique » et entend, à partir d'une reformulation de la conception lefebvrienne de la notion d'espace (concret, social, mental), exhumer les qualités spécifiques de chacun des cinémas étudiés.
Cette étude de l'oeuvre d'Abbas Kiarostami prise sous ses multiples facettes (films, vidéos, installations, poèmes, opéra) tenter d'en saisir, sous l'apparent dépouillement, la complexité. Elle offre aussi l'occasion de remettre à l'ouvrage la notion même de modernité dans une perspective plus vaste suscitée par l'oeuvre elle-même, incluant les champs de l'art et de la philosophie.