Dans ce numéro, nous prenons des nouvelles des cinéastes encore en pleine préparation. Pedro Almodóvar, Alain Guiraudie, Catherine Breillat, Wang Bing, Whit Stillman, Sophie Fillières et d'autres nous font la primeur de documents sur leurs films à venir. Cette incursion qui ne présume rien de l'oeuvre telle qu'elle nous reviendra une fois montée, étalonnée, distribuée, « sortie », prolonge une rubrique récurrente dans les Cahiers depuis 2020, « Au travail », qui donne la parole à des techniciens à l'endroit où le « métier » s'articule à l'esthétique.
L'événement de ce mois de mars peut surprendre : il s'agit de la diffusion, sur Arte, de la série de Marco Bellocchio Esterno notte, parfait contrechamp à son film tourné il y a vingt ans sur l'enlèvement et l'assassinat d'Aldo Moro, Buogiorno, notte. Dans un entretien, le cinéaste revient sur son goût pour une théâtralité tantôt discrète tantôt expressionniste et la possibilité que le rythme de la série lui donne de détailler comme jamais ses personnages, diffractant les points de vue sur un traumatisme national.
Nous accordons aussi une place importante à Toute la beauté et le sang versé de Laura Poitras, portrait tout aussi diffracté de la photographe Nan Goldin, figure de l'underground américain dont le militantisme ouvre davantage au collectif qu'à un art autocentré ; et nous conversons autour d'À pas aveugles, dans lequel Christophe Cognet invite à penser des photographies réalisées clandestinement au sein des camps de concentration et d'extermination, clichés inconnus pour la plupart des spectateurs de ce documentaire.
C'est également une pluralité des approches qui marque la présence transversale dans nos pages de Jean-Luc Godard et de Paul Vecchiali : pour le premier, le livre composite et vivant de Nicole Brenez et ses documentaires projetés à la BPI entrent en écho avec une rétrospective consacrée à son comparse Jean-Pierre Gorin à Cinéma du Réel. Pour le second, mort le 18 janvier dernier, les souvenirs de sa capacité de travail et d'inventivité inextinguible, telle que se la remémorent ses acteurs, mis à contribution dans ce cinéma libre et « diagonal ».
Les sorties réjouissantes des nouveaux films de Joanna Hogg, Clément Cogitore et Sophie Letourneur, des entretiens avec Ana Katz, Patrick Wang et Michael Roemer et deux livres importants sur deux immenses acteurs du cinéma classique complètent ce numéro.
Qu'un cinéaste comme Steven Spielberg revienne sur ses années de jeunesse, sa découverte du cinéma, et avec elles, les joies et souffrances qui l'accompagnent, est un véritable événement. Parce qu'il est sans doute le cinéaste américain pour qui l'enfance a le plus eu une place privilégiée. Mais aussi parce qu'à 76 ans, il a fini par représenter comme aucun autre l'idée du cinéma comme émerveillement, à une époque où le rapport au spectaculaire et à la salle semble plus tourmenté que jamais. Des entretiens avec Michelle Williams (qui joue le rôle de sa mère dans the Fabelmans, et figure en couverture de ce numéro) et Tony Kushner (producteur et scénariste), ainsi que plusieurs textes analysant l'oeuvre de Spielberg abordent par plusieurs biais celui qui restera sans doute comme le film le plus important et singulier de sa carrière.
La sortie en version restaurée de Sois belle et tais-toi ! de Delphine Seyrig, où l'actrice donnait la parole, en 1975, à vingt-trois comédiennes, est l'autre événement de février : il rappelle l'importance historique de ce film mais aussi la singularité d'une figure essentielle, Seyrig, sans doute l'une des plus aimées de l'histoire de la revue, approchée à différents moments de son travail dans un « Cinéma retrouvé » diffracté et fourni.
Les sorties du mois, entre autres les nouveaux films de M. Night Shyamalan et de Hong Sang-soo, ainsi que d'autres manifestations, expositions, cycles et parutions, comme le monumental volume des carnets d'Ingmar Bergman, complètent ce numéro.
Exclu, sans qu'on ne comprenne exactement pourquoi du palmarès du festival, le nouveau film d'Albert Serra est, en effet, une sidération. Les Cahiers se penchent sur ce moment fort de l'année cinématographique avec un ensemble de textes sur Pacifiction et qui accompagnent les longs entretiens que le cinéaste et son acteur Benoît Magimel nous ont accordés. D'autres sorties importantes du mois sont traitées en profondeur, comme Les Amandiers de Valéria Bruni Tedeschi ou Armageddon Time de James Gray, deux autres cinéastes que nous avons rencontrés pour ce numéro, ainsi que Saint Omer, d'Alice Diop, l'un des films français les plus attendus de l'année. Dans notre rubrique « cinéma retrouvé », nous revenons sur l'oeuvre d'Akira Kurosawa, à l'honneur d'une rétrospective à la cinémathèque française, et du seul et absolument hallucinant film réalisé par l'acteur Alain Cuny, L'Annonce faite à Marie, récemment restauré. Sans oublier toutes les autres nouveautés DVD, (les premiers westerns de John Ford, Casque d'or de Jacques Becker...), livres (la réédition du Dictionnaire de Jacques Lourcelles, Lav Diaz : faire face...), ainsi que l'actualité des festivals, sorties hors salles, et notre chronique de la journée d'appel à des États généraux du cinéma français.
Alors que les successifs confinements ont rendu plus visibles une série de bouleversements dans la création et la diffusion cinématographique, les Cahiers ont voulu s'emparer de cette crise et, suite à l'appel à des états généraux du cinéma du mois d'octobre, faire un point sur la situation du cinéma d'auteur en France. Ce numéro donne des perspectives critiques pour s'éloigner des diktats et conclusions trop rapides du box-office. Pour cela, on interroge des cinéastes, des spécialistes économiques, on retrace le parcours de la production et la distribution de films récents importants pour la revue, mais surtout on regarde les films français qui ont marquée cette année, et ce qu'ils nous disent sur leur propre fabrication et leur vision du monde et de la société française. Et pour ce dernier numéro, on vous dévoile les tops 10 de la rédaction, dévoilant quel est le plus beau film de 2022 pour les Cahiers du cinéma. Sans oublier des nombreuses critiques, certaines accompagnées des entretiens, sur les films importants qui arrivent dans les salles ce mois-ci, comme Le Parfum vert de Nicolas Pariser, Poet de Darezhan Omirbaev, She Said de Maria Schrader, Les Années super 8 d'Annie Ernaux et David Ernaux-Briot, Godland... Ainsi que l'actualité des ressorties, DVDs, livres, où il est question d'Ernst Lubitsch, Marie-Claude Treilhou, Dennis Hopper, ou encore de l'extraordinaire Anna d'Alberto Grifi et Massimo Sarchielli, dont la restauration est un véritable événement cinématographique.
Exceptionnellement, nous revenons en couverture de ce numéro sur un film qui est déjà en salles depuis un mois, Nope de Jordan Peele. Rarement un film, un « blockbuster de l'été » aura autant divisé, autant suscité des interprétations, des critiques, des débats. Il nous semblait indispensable d'y revenir pour proposer différentes visions sur un film aussi clivant et, pour nous, aussi important. Jordan Peele lui même livre quelques secrets dans l'entretien qu'il nous accorde, où il approfondi dans sa vision du film, sa conception, sa fabrication, mais aussi sur l'accueil qu'il a provoqué. Nous sommes persuadées qu'entre autres, on se souviendra de 2022 comme l'année de Nope, mais cela ne nous fait pas oublier d'autres grands films qui arrivent en salle ce mois-ci, comme Chronique d'une liaison passagère d'Emmanuel Mouret (qui se livre dans nos pages à un jeu de références cinéphiliques qui vont de Lubitsch à Woody Allen) ou Juste sous vos yeux de Hong Sang-soo. Joe Dante et Joao Pedro Rodrigues sont aussi parmi les cinéastes qui s'expriment dans ce numéro, tout comme un texte très émouvant du jeune réalisateur espagnol Jonas Trueba sur l'oeuvre de Jonas Mekas. Finalement, un long dossier sur Douglas Sirk, l'un des plus grands cinéastes hollywoodiens, étudie son oeuvre américaine et allemande (quand il s'appelait encore Detlef Sierck) à l'occasion d'une grande retrospective à la Cinémathèque française qui sera sans doute l'un des moments forts du cinéma de cette rentrée.
Notre numéro de juin profite du Festival de Cannes pour faire un point sur une question qui a régulièrement passionné les Cahiers, celle des actrices et acteurs français dont les films dans les différentes sections offraient un aperçu nouveau. Virginie Efira, Benoît Magimel, Karim Leklou, Lina Khoudry ou Vincent Lacoste. C'est avec lui que nous avons eu envie d'échanger longuement, lui qui représente une nouvelle donne de l'acteur, quelque part entre le naturel autodidacte de Depardieu et une plasticité proche de la BD. Deux dates anniversaires nous ont aussi donné envie de revenir à deux figures essentielles pour l'histoire du cinéma et de la critique en France : Alain Resnais, avec plus de 15 pages (dont un entretien avec Sabine Azéma) pour fêter son centenaire, et Serge Daney, disparu il y a 30 ans et dont l'héritage est toujours vivant, comme le confirme notre table ronde avec des jeunes critiques. Françoise Lebrun, qui nous a accordé son temps et ses archives, au moment de la sortie de La Maman et la Putain restauré, complète un numéro marqué par le fil des comédiennes et comédiens, et dévoile une vérité intime de son métier au long d'une riche carrière qui va d'Eustache à Pierre Creton, en passant par Paul Vecchiali, Adolfo Arrietta, Michèle Rosier ou même récemment Gaspar Noé.
Au sommaire de ce numéro collector : -100 pages consacrées à JL Godard -Des entretiens, des archives des Cahiers autour des films et des textes de JLG -De nombreux contributeurs : Martin Scorsese, Isabelle Huppert, Leos Carax, Jim Jarmush, F.J Ossang, Luc Moullet, Dominique Païni et bien d'autres... -Mais aussi des textes inédits : de Jean Narboni, Antoine de Baecque, Alain Bergala, Charles Tesson et de la rédaction...
Après son récent Oscar pour Drive My Car, rencontre exclusive avec Ryûsuke Hamaguchi à l'occasion de la sortie de son nouveau film, Contes du hasard et autres fantaisies, dans un dossier de couverture qui permet d'explorer et comprendre l'univers du cinéaste japonais. En outre, un retour à La Règle du jeu de Jean Renoir et ce qu'il nous apprend sur notre époque, une enquête sur l'avenir de la production du cinéma en Afrique et un ensemble sur le nouveau film de Jonas Trueba, le réalisateur du très prometteur Eva en août.
Chaque année, le Festival de Cannes représente la plus grande rencontre mondiale du cinéma. À l'occasion de cette édition, nous avons voulu donner la parole à des cinéastes de la sélection officielle, dans une série de longs entretiens avec David Cronenberg, qui présente son nouveau film très attendu Les Crimes du futur, Serge Bozon, un nouvel arrivé à Cannes, ou encore Arnaud Desplechin et Marco Bellocchio. Le Festival sera aussi l'occasion de redécouvrir La Maman et la Putain, film légendaire de Jean Eustache qui enfin restauré arrivera en salles en juin. Nous consacrons un long dossier à ce film, si important pour l'histoire de la revue et pour ses lecteurs. En plus de ces deux grands ensembles, vous pouvez trouver dans ce numéro des textes sur Marilyn Monroe, Jean-Pierre Mocky, Shoei Imamura, et bien entendu, nos critiques des meilleurs films en salle ou plateformes et encore des séries, en plus de notre habituel Journal où l'on décrypte l'actualité cinématographique du mois.
Les Cahiers vous proposent de passer un été avec Pier Paolo Pasolini et Rainer Werner Fassbinder, dont les films brûlent encore, cent ans après la naissance du premier et quarante après la mort du second. Intraitables, ces deux cinéastes n'ont jamais opposé conscience de l'histoire (les ruines fumantes du fascisme et du nazisme) et foi inébranlable dans la fiction, dans la truculence de la chair, des mythes, bazardant toute approche naturaliste. L'incandescence d'Accattone et de Tous les autres s'appellent Ali anime le travail de cinéastes aussi différents que Wang Bing, Catherine Breillat, Albert Serra ou Nadav Lapid, qui livrent aux Cahiers leur choc devant Saló ou, pour ceux qui ont été partie prenante des tournages, Ingrid Caven et Bulle Ogier. L'ensemble de trente pages consacrées à ces deux cinéastes et en particulier au bouillonnement des années 1970 questionne leur rapport à la télévision, aux mythes, au corps en général et à la sexualité en particulier. Il inscrit aussi tout le numéro sous les auspices d'une approche délibérément non-patrimoniale des films qui nous arrivent restaurés : : Chantons sous la pluie, (l'occasion de réévaluer la part de Gene Kelly dans la mise en scène), mais aussi les chefs-d'oeuvre de Djibril Diob Mambéty ou les propositions singulières de Coni Beeson et de Tacita Dean. Qu'ils soient découverts en festival (on trouvera dans nos pages la moisson de Côté court et du Festival d'animation d'Annecy) ou distribués au retour de Cannes (les derniers films de Dominik Moll, Damien Manivel, Saeed Roustaee...), les films que nous vous invitons à voir cet été ont tous en commun la nécessité absolue du grand écran, du dispositif de la salle, que le président Macron, dans une récente « sortie » médiatique sur laquelle Bruno Icher revient dans sa chronique mensuelle - appelle à « réinventer ». Une trilogie de « Jean-Louis » traverse aussi ce numéro de juillet-août. Comolli et Schefer, deux penseurs qui les a nourris au cours de leur histoire ; et Trintignant, qui comme aucun autre, rappelle Mathieu Macheret dans un portrait substantiel au prisme de ses rôles, a su « incarner le doute fondamental » : une bonne définition de la démarche critique de la revue qui aux oukases politiciennes et au fléchage culturel a toujours substitué des joies cinéphiles, obtenues par secousses (Fassbinder), pirouettes (Donen), courts-circuits (les écrits poétiques de Bunuel sur le cinéma), assomptions (Damien Manivel), trouées de fantastique (L'Esprit sacré, qui sort ce mois-ci). Surprenant été à tous !
Pattinson l'apprenti entretien avec Robert Pattinson - par Cyril Béghin & Stéphane Delorme Retour de Cannes Festival de New York - Des migrants à toutes fins utiles - Néo-réacs - Claire's camera?: Cannes l'année d'avant - Eastern - Jeune Italie - Confirmation par le picaresque - Où est passé le numérique?? - Il suffit d'une idée - Twin Peaks?: le temps qu'il faut pour revenir - Anesthésie générale - S'effondrer ou être enfoncé - Cinéma positif - Moments musicaux - Tant d'enfants, si peu de sortilèges?! - Visages, visages - Vive les excentriques?! - Fraîcheur ACID Et le film continue... entretien avec Ahmad Kiarostami - par Nicholas Elliott Okja de Bong Joon-ho - par Joachim Lepastier Visages Villages d'Agnès Varda & JR - par Nicholas Elliott
Les films les plus attendus de 2018The Death and Life of John F. Donovan de Xavier Dolan High Life de Claire Denis Amanda de Mikhaël Hers Coin-Coin et les zinhumains de Bruno Dumont Ash is Purest White de Jia Zhang-ke Au Poste ! de Quentin Dupieux The House That Jack Built de Lars von Trier LÎle aux chiens de Wes Anderson Un couteau dans le coeur de Yann Gonzalez Paul Sanchez est revenu ! de Patricia Mazuy Long Days Journey into Night de Bi Gan Jessica Forever de Jonathan Vinel & Caroline Poggi Season of the Devil de Lav Diaz Synonymes de Nadav Lapid Sophia Antipolis de Virgil Vernier Le Bel Été de Guillaume Brac Les Garçons sauvages de Bertrand Mandico Les autres films et séries de 2018 Le deuxième continent (bientôt sur petit
Et d'abord pourquoi cette question?? À l'heure d'Internet, des réseaux sociaux, des séries TV, des jeux vidéos, de la réalité virtuelle, d'un magma audiovisuel général, nous ressentons le besoin de réaffirmer pourquoi (on aime) (préfère) (choisit) le cinéma. Pourquoi la «?pensée cinéma?» est toujours celle qui nous guide. Y compris pour aimer des vidéos sur Internet, des séries (on l'a vu avec Twin Peaks) ou la VR?: car cette pensée voyage et souffle où elle veut. Notre regard et notre savoir sont formés par un siècle foisonnant de théories et de pratiques de l'image en mouvement, comment l'oublier?? Plus profondément pourquoi le cinéma plus qu'un autre art ou qu'un autre hobby?? Qu'est-ce qu'on y trouve?? Pourquoi on passe tant de temps à voir des films, comme hors du temps?? Il faut donc réaffirmer ses points cardinaux?: le montage, la mise en scène, le réalisme, l'émotion, le film, le spectateur passif, la salle (ou l'idée de la salle), la pensée. Peu importe que le format soit celui d'une série ou d'une vidéo, si il y a du «?cinéma?» par-delà le récit mécanique, le ping-pong du dialogue qui fait mouche, les stéréotypes sociaux ou la caméra qui «?suit?» les personnages. Qu'il n'y ait déjà plus de cinéma dans beaucoup de films est une évidence tant l'imagerie télévisuelle l'a emporté.