Pour Ford, le cinéma était une façon de créer un monde privilégié qui fonctionnait selon ses propres règles. Un monde où il était le "Patron" incontesté, le "Chef", le "Vieux", le "Pappy" d'une famille d'acteurs et de techniciens. Les Indiens Navajo l'appelaient "Natani Nez", généralement traduit par "Grand Soldat". De film en film, Ford utilisait les membres de sa troupe dans des rôles semblables. Ses acteurs sont devenus de vieux amis pour des spectateurs qui les ont vus vieillir. Son oeuvre possède la résonance envoûtante d'une mémoire tribale. " Un plateau de Ford, a écrit le critique Andrew Sarris, c'est une communauté propre représentant à l'écran une communauté plus vaste et plus lyrique encore. " Mari absent et parfois infidèle, Ford fut un père médiocre en raison de sa personnalité dominatrice et de son égocentrisme. Sa vraie famille était celle du cinéma. Le " mystère John Ford " n'est pas seulement celui de ces films délicats et émouvants, réalisés par un type mal dégrossi. C'est le mystère de sa personnalité. Dans L'Homme tranquille et The Secret Man (L'Inconnu), Ford révéla quelque chose d'intime ; pour le reste, à quiconque essayait de pénétrer les secrets de son art, il répondait par monosyllabes, des je ne sais pas hautains ou des remarques énigmatiques, avec une indifférence calculée ou une attitude sarcastique. Ce qu'il faisait, c'était simplement " a job of work " : un boulot. (extrait). Après Conversations avec Billy Wilder et Howard Hawks, le renard argenté d'Hollywood, publiés dans cette même collection, voici un nouvel ouvrage consacré à l'un des grands cinéastes d'Hollywood.